Dans la plupart des commerces, qu’ils soient physiques ou numériques, un catalogue est composé de produits ayant un cycle de vie. Les articles peuvent tout d’abord être en précommande, puis ils sortent officiellement et deviennent une nouveauté, pour connaître par la suite leur période de vente classique. Puis vient le temps où ces produits cessent d’être vendus, quelle qu’en soit la raison – on imaginera pour se faire plaisir qu’il s’agit toujours de bonnes raisons, car dans le monde merveilleux des cigales qui chantent et des abeilles qui butinent la lavande, tout est toujours beau, tout est toujours bien pensé, les équipes de vente et la Direction ne prennent jamais de décisions irréfléchies basées sur une mauvaise interprétation (quand il y en a une) des chiffres.
Mais trêve de belles paroles, fi des belles illusions, passons à la question que n’importe quel responsable e-commerce devrait se poser à cet instant :
J’en fait quoi de mes produits terminés, BORDEL ?
Bonne question.
Et comme toute bonne question, la réponse n’est pas si simple, et les choix sont multiples.
Prenons un calisson et étudions les possibilités.
Solution 1 : supprimer les produits du site
Ha, je suis sûr que c’était votre première idée, à vous aussi ? Avouez !
En effet, on pourrait dire que cette solution « tombe sous le sens ». Elle dégouline de logique, telle la bave du Hutt sur l’infortunée prisonnière à deux doigts de se faire bouffer par un sympathique rancor.
** Applaudissements du public devant tant de poésie **
** Légère inclinaison du buste de votre serviteur en guise de salut **
** Standing ovation **
** Sourire n° 24 bis de votre serviteur **
** Le public féminin s’évanouit. Le public masculin admire la puissance à l’oeuvre **
Hum hum. Où en étions-nous ? Ha oui, votre idée géniale, logique, tout ça.
Je résume :
Solution de facilité, manque d’imagination flagrant, excellente capacité à rater les opportunités.
Franchement :
Je n’en attendais pas moins de vous.
Bon, allez, admettons que vous vouliez absolument les retirer de votre site, ces produits terminés. Disons qu’ils vous gênent, que leur vue vous est insupportable, que la seule idée de les avoir toujours présents sur votre site e-commerce tout beau tout mignon vous donne des boutons.
Reste à bien gérer le truc.
Car retirer un article d’un site implique un certain nombre de conséquences d’un point de vue SEO mais aussi commercial.
Suivons le raisonnement :
- Vous supprimez un article de votre site. C’est simple comme bonjour, dans Prestashop c’est fait en 2 clics, et si vous êtes malin l’opération aura été faite automatiquement en fonction de certains critères disponibles dans votre ERP (stock, bons de commande fournisseur, statut…. ça vous parle ?). Mais non je déconne, je sais que vous le faites à la main.
- D’un point de vue SEO, vous supprimez de votre site une URL qui était indexée sur les moteurs de recherche (du moins je l’espère pour vous, qu’elle était indexée ^^), qui possédait aux yeux de Google une certaine popularité, et qui était plus ou moins bien positionnée sur quelques mot-clés fort intéressants pour votre commerce (imaginons dans le monde merveilleux qui est le notre, que cette URL était HYPER bien placée). Soyons précis : à ce stade vous ne retirez pas vraiment une page de l’index de Google, vous retirez une page de votre site uniquement, et c’est une différence importante car pour Google, sauf preuve du contraire, votre URL existe toujours (genre fantôme, spectre, revenant, bref un truc qui fout la trouille quand on est tout seul, qu’on écrit un article tard le soir dans le noir et que … enfin bref vous avez compris).
- D’un point de vue commercial, le noob que vous êtes vient de supprimer une page que certains clients consultaient peut-être de temps en temps. Cherchez « google analytics » sur un moteur de recherche et vous comprendrez où je veux en venir.
Donc pour résumer, à ce stade vous avez supprimé une page qui avait du potentiel SEO, et vous avez privé vos clients d’un point d’entrée intéressant. Vous avez donc potentiellement privé votre site e-commerce d’une source de revenu. Les plus sceptiques – oui là les deux du fond – se disent déjà que je débloque et qu’on ne fait pas de l’argent avec un produit qu’on ne vend plus.
HA.
HA.
HA.
En fait, si.
Un produit que vous ne vendez plus, peut quand même vous rapporter beaucoup d’argent. Donc les deux du fond peuvent fermer leur grand gueule et écouter.
Car comme le disait Jean Gabin :
Quand on parle pognon, à partir d’un certain chiffre, tout le monde écoute.
Donc comment allez-vous faire pour continuer à faire de l’argent sur un produit terminé ? Et accessoirement, comment allez-vous gérer proprement cette fin de vie du produit, pour que tout soit clean au niveau SEO, et ce alors que vous retirez totalement le produit en question de votre site. Bon, pour tout dire, y’a pas 36 solutions, j’en vois personnellement 3. Si vous avez de meilleures idées, les commentaires vous sont ouverts.
Pour ce qui suit, toute ressemblance avec un autre excellent film serait purement pas fortuite.
Nous avons donc :
La solution du Bon : une belle page d’erreur 404 (ou 410), avec le code HTTP éponyme évidemment. Le client qui arriverait par mégarde sur cette page est content, car il comprend que la page n’existe pas (ou plus). Comme nous sommes dans un monde merveilleux, vous avez tellement bien fait cette page 404 que le client vous reste fidèle, qu’il continue sa navigation car vous lui avez proposé des produits intéressants, vous lui avez dit que vous l’aimiez presque autant que Jaime Lannister aime Cercei. Mais non je déconne, vous avez fait comme 99% des gens et votre page 404 est pourrie jusqu’à l’os, avec un taux de rebond qui s’approche du taux de participation à une élection dans un pays du Tiers-Monde. Surtout ne changez rien, vous êtes parfait ! Quant à Google, pas de mystère, il fera comme un Humain et il comprendra que finalement cette page n’a plus d’intérêt pour vous. Techniquement tout est merveilleux. En termes d’opportunité manquée vous faites aussi très fort. Ne changez rien, je vous dis…
La solution de la Brute : une …. une quoi ? Une 404 ? Mais lol l’autre keskonsenfout on laisse le message du serveur comme quoi il trouve pas la page, de toute façon ça partira en timeout au bout de 30 secondes donc OSEF. La brute ne fait rien de spécial pour les pages supprimées du site. C’est … bah c’est la brute quoi. Chaque fois que vous faites un truc pareil, un bébé panda meurt dans d’effroyables souffrances. Une perspective certes amusante quand on l’imagine, mais qui ne fait pas avancer votre business.
La solution du Truand (spoiler : c’est ça qu’il faut faire) : la seule solution à mon sens qui permet de conserver un maximum de popularité de la page, tout en perdant un minimum de clients, c’est la bonne vieille redirection 301 sur un produit complètement similaire, et qui idéalement prend la suite du produit abandonné. Imaginons que vous vendez de la farigoule sur votre site. Bon. Vous arrêtez la farigoule, pourtant vous étiez premier dans la SERP sur le mot-clé correspondant, avec un max de visites entrantes à la clé. Bon, déjà là, sans être Einstein, vous avez compris que vous veniez de faire une connerie, mais admettons : vous arrêtez la farigoule pour de bon. Si – par le plus grand des hasards – vous vendez aussi de la farigoulette, une belle redirection 301 vous permettra de récupérer à la fois une belle position sur Google (vous êtes tellement malin que vous avez dans le même temps adapté vos balises méta et votre contenu, j’en suis per-sua-dé !), mais aussi des clients. Dans le pire de cas, sans produit similaire, il reste possible de faire la 301 vers la catégorie de niveau supérieur pour tenter de récupérer un peu de popularité et de visiteurs.
La troisième solution, c’est le minimum vital si vous avez vraiment décidé de supprimer une page de votre site.
Mais est-ce qu’en gardant cette page sur votre site, vous n’auriez pas pu faire mieux ?
Solution 2 : garder les produits sur le site
Je suis le roi des transitions. Bref.
On garde la page sur le site, on a fait péter le code HTTP 200, c’est cool : popularité SEO, visites entrantes, tout y est dans votre outil d’analytics, c’est vraiment le pied total.
Ho merde : y’a plus de ventes et le taux de rebond a explosé. C’est moche. Pourtant vous étiez sûr que ça passerait nickel comme solution, votre responsable webmarketing vous l’avait recommandé chaudement. Il me vient du coup une citation célèbre de Lino Ventura à l’esprit :
Les cons ça ose tout. C’est même à ça qu’on les reconnait.
Rassurez-vous : si les ventes s’arrêtent net et que le taux de rebond explose, c’est normal. Parce que figurez-vous que le fait d’afficher un gros « vente terminée », « produit en rupture définitive », « plus de farigoule en stock », ça le fait moyen sur l’inconscient d’un client qui n’a que 2 clics à faire pour se barrer et aller sur un autre site de vente en ligne.
Donc le client qui a fait l’effort de venir sur votre page, même sur un produit terminé, il faut le garder. Le bichonner. Lui montrer que vous l’aimez presque autant que Jaime Lannister aime … enfin bon vous avez pigé.
Quelques techniques simples mais qui augmenteront drastiquement votre taux de conversion (enfin, surtout les deux premières) :
Les articles similaires
Faire un petit algo maison qui récupère les articles en stock, très similaires à l’article que vous ne vendez plus, c’est facile. Essayez de récupérer automatiquement une liste d’articles de la même catégorie, si possible de la même marque, et dans la mesure du possible dans une tranche de prix semblable au produit terminé. Affichez ce petit groupe de produits sur la page en les mettant bien en évidence. Plus les produits similaires seront pertinents, avec un petit message incitatif, et plus vous diminuerez votre taux de rebond.
Les articles de remplacement
Si vous préférez agir de façon chirurgicale, essayez de trouver UN produit de remplacement. Imaginez que vous êtes l’unique vendeur d’un magasin physique : un client entre, vous demande de la farigoule, que vous ne vendez plus. Que diriez-vous à ce client si votre objectif était qu’il reste dans votre magasin et achète quand même quelque chose ? Vous lui diriez très probablement quelque chose comme « Nous n’avons plus de farigoule, mais en revanche je peux vous proposer de la farigoulette, et pour m’excuser de ce désagrément je vous fais même une réduction ». Comme le disait Jean-Claude Dusse :
On sait jamais, sur un malentendu ça peut marcher !
La redirection du fourbe
Une solution plus moche que les autres, mais qui peut marcher, consiste à faire une redirection côté client au bout de X secondes, X étant le temps que votre fine équipe de webmarketeux aura déterminé comme étant le temps qu’il faut au client pour être déçu et avoir envie d’aller à la concurrence. La redirection en question pointera idéalement vers un produit de remplacement estampillé « nouvelle référence » ou « nouvelle version », ou à défaut vers la catégorie principale, sur laquelle le client pourra constater qu’il n’y comprend plus rien, conduisant à son départ. Pas de vente, mais vous avez réduit votre taux de rebond, vous pourrez toujours accuser le département des ventes qui, c’est bien connu, passe son temps à faire chier le monde avec des produits pourris vendus toujours trop chers par rapport aux concurrents.
Un très gros site e-commerce faisait cela il y a quelques années, et le fait peut-être encore. Personnellement je trouve cela un peu laid.
C’est tout !
Je sais, je sais. Les esprits chagrins diront que j’ai du mal avec les conclusions.
C’est pas faux !
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